« Erin, Erin. Ma petite fille si jolie. Je t'ai tellement attendue. »
Toujours les mêmes mots. Toujours la même mascarade. J'avais mal à chaque fois que j'assistais à ce spectacle. Je ressentais toujours une grande pitié pour la femme dans une robe de chambre blanche en face de moi, mais pas que ça. Plusieurs sentiments se mêlaient en moi. Du dégout, de la colère, de la tristesse. Et surtout un grand vide.
A chaque fois, j'observais ces mains où brillait une alliance dorée attraper une poupée de chiffon aux cheveux bruns. Ces mains qui la caressait, ces bras qui venaient la serrer et la bercer comme on protégerait un enfant. Ces mains qui elles, ne m'avaient jamais touché. Pareil pour ces yeux bleus dont j'avais hérités qui jamais ne s'étaient posés sur moi, ne m'avaient jamais remarqué, comme si j'étais un fantôme. Comme si je n'existais pas. Et c'était sans doute ça. Pour cette femme je n'existais pas. « Erin », c'était cette poupée de chiffon qu'elle traitait comme sa fille. Ce n''était pas moi.
L'atmosphère de cette pièce me donnait toujours envie de vomir, et pourtant mon père me forçait toujours à y aller. Quelque part, je crois que il cherchait à me punir en m'infligeant ce spectacle. Après tout, c'était moi qui l'avait rendue ainsi.
Ma mère m'a mis au monde un jour de pluie. Je sais qu'elle avait depuis longtemps rêvé d'avoir un enfant, et qu'elle désirait avoir une fille. Erin. Ce fut le nom qu'elle avait choisi pour le petit être dans son corps. « Et si c'est un garçon ? » Lui avait demandé mon père en riant. A cette question, elle avait simplement souri et répondu qu'elle chercherait un autre nom à ce moment là, car elle aimerait son bébé peu importe son sexe.
Seulement, rien ne s'est passé comme elle le désirait. L'enfant qu'elle attendait depuis tellement longtemps était enfin venu au monde. Cela aurait du être un moment de joie immense pour elle après toutes les souffrances qu'elle avait endurées pour le faire sortir au grand jour. Mais lorsqu'elle le prit dans ses bras, le petit garçon qui poussait tout juste son premier cris dans ce monde se changea en quelque chose qui n'avait plus rien d'humain. Je crois que ce jour là, ma mère s'est « cassée ». Après ça, plus jamais ses yeux ne m'ont vu, et elle s'est convaincue qu'une poupée était la fille qu'elle désirait depuis toujours. Elle a été placée dans un pavillon tout au fond de la demeure des Kyôya, où on a essayé de la guérir. Mais rien n'y faisait, elle restait accrochée à sa poupée. Elle m'ignorait toujours. C'était comme si elle ne m'entendait même pas. Quand je réclamais son attention, je ne récoltais que du vent.
Quand j'ai eu quatre ans, il fut décidé de stopper cette mascarade, et de la remplacer par une autre bien plus douce... sauf pour moi. Désormais, « Erin » n'existait plus du tout, que ce soit en poupée ou non. La mémoire de ma mère fut effacée à propos de tout ce qui me concernait. Elle retrouva un esprit sain et une vie normale avec mon père. Ils retrouvaient tous les deux leur famille, mais moi, je n'en faisais plus parti. Ou en avais-je seulement déjà fait parti une fois ? Pour eux, je n'étais plus qu'un étranger. Mon père venait toujours s'occuper de moi, mais maintenant que sa femme allait bien, il me délaissait à son tour pour elle. Alors, je me suis mis à les détester tous les deux d'ainsi m'abandonner. Je n'étais qu'un enfant, et tel un enfant, j'étais égoïste. Je voulais tout cet amour pour moi, je ne voulais pas qu'ils le gardent entre eux. Je voulais qu'ils m'en donnent. Mais hélas, je n'étais plus qu'un étranger à présent.
Dès que je fut assez grand pour ne plus avoir besoin d'être surveillé en permanence, c'est à dire à treize ans, on me fit loger seul dans un peu studio de la résidence des Kyôya. A partir de là, mon père cessa tout simplement de venir me voir. Sans doute que pendant toutes ces années, il ne s'était occupé de moi que par obligation. Maintenant, il était libre de recommencer sa vie avec sa femme. Bien sûr, au vu de mon jeune âge il y avait des domestiques chargées de vérifier que je me portais bien et aussi de m'apporter à manger chaque jour et l'une d'elle veillait à mon éducation, m'aidant à faire mes devoirs par exemple et s'assurant que je me levais bien le matin pour aller en cours. Mon père me faisait un virement d'argent tous les mois aussi et s'occupait de loin de remplir les paperasses administratives me concernant comme l'école ou autre, par obligation bien sûr et aussi pour se déculpabiliser de me laisser sans doute. Même s'il ne voulait pas de moi nous restions liés par le sang après tout. Je crois que c'est principalement pendant cette période que je me suis renfermé sur moi-même. Je n'avais personne, je ne pouvais compter que sur moi. Alors je n'ai plus cherché à me lier aux autres, sans parler du fait que la malédiction n'aidait pas dans ce sens là. Qui voudrait être ami avec quelqu'un qui risquait de se changer en panda ? Avec un monstre ? J'ai ainsi passé la majeure partie de ma scolarité seul, n'ayant que pour seules connaissances « proches » les autres maudits de ma famille. C'étaient les seuls avec qui j'acceptais de m'ouvrir, et ça me fit du bien de pouvoir parler à d'autres personnes. Il y avait des gents qui connaissaient des souffrances semblables aux miennes, et ça me rassurait. Ça me faisait presque plaisir de ne pas être le seul malheureux. Quelque part, j'étais peut-être aussi « cassé » que ma mère.
Durant l'année de mes seize ans il y eut une réunion de famille entre les maudits et le chef de famille. Il y en avait tous les mois ou presque à vrai dire, mais si je me souvenais particulièrement de celle-ci c'était parce qu'un de mes cousins m'avait dit une chose étrange.
« Au fait, tu t'entends bien avec ton frère ? »
Un frère ? Quel frère ? J'ai regardé mon camarade d'un air perplexe, me demandant s'il ne se trompait pas de destinataire.
« Bah, tu ne sais pas ? Tomas, c'est ton demi-frère. »
Ce fut de cette manière que j'appris que mon père s'était remarié peu après que ma mère eut sa mémoire effacé. Il avait eu un enfant avec sa nouvelle femme, un maudit aussi. Et cette fois, il l'avait gardé. Plusieurs sentiments passèrent en moi suite à ces révélations. De vieilles rancœurs envers mes parents, de la colère, une sensation d'injustice, et aussi de la jalousie envers cet enfant qui recevait tout ce qu'on m'avait refusé. Durant un bon mois, je fut d'une humeur exécrable. Je ne parlais pas plus que d'habitude, mais j'étais vite agacé. Toutefois, après un moment et remarquant que ce demi-frère dont je ne savais rien m'observait avec curiosité dès qu'on se croisait, j'ai fini par prendre sur moi. Bon... j'étais en colère contre mon père, de m'avoir abandonné, d'avoir abandonné ma mère, qu'elle aussi m'ait laissé... Mais Tomas n'y était pour rien dans tout ça après tout. Je n'allais pas lui reprocher sa naissance, on me l'avait assez reprochée comme ça inutile de le faire subir à un autre. Alors, une fois les sentiments négatifs apaisés, je fus curieux à mon tour. Je n'osais vraiment approcher Tomas, qu'aurais-je à lui dire ? Mais j'avais petit à petit envie d'apprendre à le connaître. Toutefois, notre relation n'évolua pas plus que ça faute d'opportunité.
Ce fut ainsi moins renfermé, sans être devenu bavard pour autant, que je pus finir ma scolarité. Je n'avais pas beaucoup d'amis, mais c'était plus dû au fait que je dormais souvent debout qu'autre chose à présent. J'avais décidé de rester habiter la résidence des Kyôya, et puis de toutes façons, en tant que maudit je n'étais pas sûr qu'on accepte de me laisser partir. Je n'ai pas voulu faire d'étude, je n'en avais ni l'envie ni la motivation. Alors j'ai préféré faire des petits-boulots, en prenant un nouveau dès que le précédent était fini. Ça ne me permettait pas de vivre dans le luxe, mais suffisamment bien. Et puis je faisais en sorte de garder des économies pour le futur, bien que j'ignorais totalement de quoi il serait fait.
Et je l'ignore toujours d'ailleurs.
~♥~♥~♥~♥~♥~♥~
Erin possède une silhouette plutôt normale. Il n'est ni grand, ni petit. Juste dans la moyenne, ou alors juste plus grand d'un centimètre. De même, s'il n'est pas musclé il n'est pas rachitique pour autant. Quoiqu'on puisse en dire, c'est un garçon bien portant et tout ce qu'il y a de plus banal.
Enfin, pas tout à fait non plus. Il y a quelques détails de son anatomie qui attirent l'attention. La première sont ses cheveux, qui sont d'un blanc qu'on pourrait juger inquiétant à son âge. Maladie rare ? Vieillesse prématurée ? Rien de tout ça. Il ne doit sa couleur de cheveux qu'à sa particularité d'être maudit. On pourrait dire qu'il a en quelque sorte hérité du poil blanc de l'animal avec lequel il se trouve lié. D'ailleurs, sa tignasse est souvent en désordre comme s'il venait tout juste de se réveiller, ce qui n'est jamais très loin de la vérité. Il prend d'ailleurs rarement la peine de les brosser. Il passe juste rapidement sa main dedans pour un peu les arranger, et c'est tout.
Ses yeux bleus sont souvent cernés dû au fait qu'il est toujours fatigué. Il ne dort pas assez la nuit ; huit heures de sommeil ne lui suffisent pas du tout. Il en a besoin de dix ou onze pour être parfaitement en forme. Mais malheureusement, son travail ne lui permet pas toujours de faire la grasse-mâtiné. Autre petit détail ; il a un grain de beauté sous l'œil gauche.
S'il y a une chose que Erin apprécie, c'est d'être bien dans ses vêtements. De ce fait, il en achète toujours une taille au dessus de la sienne pour y être à l'aise. Il a horreur de tout ce qui est serré et n'a d'ailleurs jamais porté la veste de son uniforme au lycée, même en hivers, à cause de ça. Il supporte d'ailleurs très bien le froid, en revanche il est sensible à la chaleur. De ce fait, il porte rarement des vêtements épais ou longs. Une autre de ses particularités est qu'il a quasiment tout le temps un bonbon dans la bouche, en général une sucette. Pour palier à son manque de sommeil il consomme beaucoup de sucre afin d'avoir de l'énergie, et de plus manger quelque chose le tient éveillé. Il s'est souvent fait réprimander au lycée pour ça d'ailleurs ; soit il dormait en cours, soit il mangeait des bonbons.
A présent, que peut-on bien dire sur le caractère de ce garçon ? Et bien, pour commencer, Erin n'est pas quelque de très réveillé. Mais alors pas du tout. Il somnole souvent à moitié et quand il s'assoit, si personne ne vient lui parler pour maintenir son attention il s'endormira très probablement. Dans ces cas là mieux vaut vite le réveiller car ayant le sommeil lourd, après une quinzaine de minutes il devient difficile de lui faire ouvrir les yeux. En général, il se sent plus éveillé en soirée et vous aurez davantage de chance de le trouver reposé le week-end, quand il ne travaille pas.
Le fait qu'il dort quasiment debout donne l'impression que le jeune homme n'est pas attentif à ce qu'il l'entoure ou ne s'intéresse à rien. Il est vrai qu'il n'est pas du genre à s'affirmer et vit sa vie tranquille dans son coin, mais s'il commence à apprécier une personne toutefois il deviendra possessif vis-à-vis d'elle et aussi protecteur. Même s'il ne le montre pas, il garde toujours un œil sur les gens qu'il aime. Il peut se montrer très affectueux quand il le veut d'ailleurs, mais il faut que la personne soit vraiment importante pour lui pour qu'il aille jusqu'à des contacts physiques. Ces années à être maudit lui ont appris à naturellement éviter de toucher les autres afin de prévenir tout accident.
Erin est plutôt quelqu'un de calme et qui évite les conflits. Pour cause ; il ne sait absolument pas gérer le stress. Les rares fois où il se met à angoisser il panique et perd tous ses moyens. Par contre, si on arrive à le mettre en colère, il n'hésitera pas à user des poings. Même si les pandas ressemblent à de grosses peluches toutes douces, ils seraient bons de pas oublier qu'ils possèdent des crocs puissants et des griffes redoutables après tout.
Accueil
Jeu 22 Aoû - 20:50
